Pour le développement de la société humaine, l'utilisation de la force de traction des animaux domestiques a été vitale aussi pour le travail du sol que pour le transport, restant importante même après l'apparition de la traction motorisée.
Dans les sociétés rurales traditionnelles, des solutions techniques archaïques se sont transmises au fil du temps. Parmi ces solutions, on trouve des outils et ensembles techniques à l'aide desquels le paysan labourait la terre, en la préparant pour être semée (la charrue) ou transportait les produits de son travail (le chariot). Une pièce commune des deux ensembles techniques est le joug, une pièce qui transfère la force motrice de l'animal à l'ensemble de la charrue ou du chariot.
Dans l’espace rural roumain, les formes les plus répandues sont les jougs doubles (pour deux animaux), mais on peut retrouver aussi le joug simple. On attelait principalement des bœufs, des animaux connus pour leur grande traction. Travaillés soit par les propriétaires des animaux, soit par les charrons du village, les jougs étaient en essence de bois dure, mais légère.
Un tel joug est celui de l'image, trouvé dans la collection MET (no. inv. 217), objet qui, du point de vue typologique, fait partie de la catégorie des jougs de cou, un type répandu dans l’Europe de l'Est et dans les Balkans. Le joug (tout l'ensemble) est entièrement en bois. Il est constitué de deux pièces qui prennent le pouvoir de l'animal et d'autres pièces qui ont le rôle de renforcer la structure et de limiter la sortie de l'animal du joug. Les deux premières pièces sont disposées parallèlement au sol et maintiennent entre elles le cou de l'animal: l'une vers le haut - le joug lui-même- et l'autre vers le bas, une tablette en bois. Le joug lui-même est fait d'un bois plus épais, de 150 cm de long, a quatre côtés, et comporte trois parties, dont deux ont une forme semi-circulaire, adaptées à la forme du cou de l'animal de trait. La tablette située en bas est une planche placée sur le côté le plus large (9 cm). A travers les trous de ces deux pièces sont insérés: (a) deux planches plus larges qui, introduites au bord intérieur de la partie semi-circulaire du joug, ont le rôle de consolider la structure entière et de maintenir les animaux en distance appropriée pour le mouvement (elles sont attachées au joug par des clous en bois); (b) des parties faites en branche de noisette, qui ont une forme naturelle courbe à l'extrémité supérieure pour éviter de glisser à travers le trou dans lequel elles sont introduites et pour retenir ainsi le cou de l'animal. Le joug est décoré sur les parties visibles (avant, arrière, dessus) par des motifs géométriques incrustés (lignes, rectangles, lignes avec des dents de loup) placés dans des champs qui suivent la forme de la pièce. Très probablement, le rôle esthétique du décor est doublé par ses significations magiques apotropaïques. Au milieu, le joug est percé afin d'insérer un clou en fer qui fixe le joug au pieu qui mène à la partie active de l'ensemble (charrue / plate-forme sur les roues du chariot)
Dans le monde paysan, l'utilisation de cet objet ne s'arrêtait pas à la pratique du travail quotidien mais, en raison de ses fonctions pratiques, le joug était utilisé comme objet à significations symboliques dans la littérature orale rituelle-cérémoniale et la parémiologie paysanne.
Dr. Petac Silvestru